Une bonne nuit de sommeil ? Pardon ? Mais ça veut dire quoi ça au juste ? Je vous l'accorde, il fut un temps où je savais plus que personne ce que ça signifiait, mais disons que ça fait maintenant à peu près quatre mois que j'ai rayé ces mots de mon vocabulaire. Y a pas à dire, je dois être le mec le plus fâtigué au monde ! Je m'en plainds, c'est vrai. Mais il y a de quoi ! Je sais pas, mais les mamans célibataires doivent certainement mieux s'en sortir que moi. Je sais pas, ça doit être écrit quelque part, ou bien ça doit être biologique, dans les gènes, j'en sais rien mais c'est un fait, les mères célibataires ont ce petit truc en plus qui fait qu'à un moment ou l'autre, elles ont le temps de se sortir la tête de l'eau et de se dire que tout va bien aller. Moi, c'est tout à fait l'inverse, je m'occupe sans cesse de ma fille, Sarah, sans même savoir si je m'en sors bien ou non. Alec ne cesse de me répéte que ça va aller, que je vais m'en sortir. ça se voit qu'il n'a pas eu à s'occuper de son fils des nuits et des nuits entières, sans même pouvoir fermer l'oeil une seule seconde. Et depuis ce matin, je n'arrêtais pas d'aller dans tous les sens. Mais bon sang, pourquoi est-ce que les bébés ne savent pas parler. Je sais pas moi, ça serait beaucoup plus simple, on saurait au moins ce qu'ils veulent. T'as faim ? Je dois changer ta couche ? T'as de la fièvre ? T'aime pas tes habits ? T'en a marre de moi ? Oui, c'est bête, mais c'est surtout très épuisant. Le bain, les couches, les courses, rechanger la couche, donner à manger, jouer, changer la couche, faire une sieste, changer le bébé, lui redonner à manger, rechanger la couche, essayer d'arrêter de le faire pleurer. Voilà à quoi se résument mes journées. Mon boulot ? Et bien j'essaye de le maintenir, tant bien que mal, en travaillant à la maison. Le problème, c'est que je dois m'en occuper tout le temps, parce qu'on ne s'y est pas pris à temps pour la crèche et qu'il n'y a plus de place avant l'année prochaine. En fait, je crois qu'on aurait dut s'y prendre un an même avant de faire le bébé. Idiot mais pourtant bel et bien réel. C'est en pensant à tout ça, que je finis pas m'endormir sur le divan, ma fille posée sur moi, un biberon dans une main et l'autre qui la soutient.

C'est la sonnette de la porte d'entrée qui me sortit de ma rêverie. « C'est pas vrai, pour une fois que je pouvais dormir ... » dis-je à voix basse. Au même moment, je posai les yeux sur Sarah. La sonnette ne l'avait pas réveillée, non, elle ne s'était même pas endormie, restant dans mes bras à jouer avec son hochet. Sa petite cloche fait pourtant tellement de bruit que c'en est parfois énervant. A croire que plus rien, au moment où je m'étais endormi, n'avait pu me barrer la route pour somber dans un sommeil profond. « Un instant, j'arrive ! » Je culpabilisai un instant de m'être endormi avec ma fille dans mes bras, et si elle était tombée ? Je refoulai cette question en me levant vers la porte, la petite toujours dans les bras. Dans le couloir, je passai devant un miroir et mon reflet me fit légèrement peur. Je comprenais maintenant pourquoi je n'osais même plus sorir, tellement mes yeux étaient cernés. Avant d'ouvrir la porte, je vérifiai de qui il s'agissait, on se sait jamais. Voyant que ce n'était "que" Marion, je lui ouvris, un grand sourire aux lèvres. « Marion ! Si tu savais combien ça me fait plaisir de te voir ! » lui dis-je avant de lui faire la bise. Et de lui faire signe d'entrer. Etant donné que je ne sortais plus que pour les promenades et les courses, il est clair qu'un peu de visite ne pouvait me faire que du bien ! Encore fallait-il voir de qui il s'agissait.